KATE
VAN DEN BOOGERT


Jury Appel à Projet 2022








Une interview d’Emmanuelle Hutin




Le compte Instagram mkrs.family (Makers) de Kate m’a intriguée et j’étais curieuse de rencontrer la femme derrière ce regard sur la création parisienne. « She made my day » comme on dit.

Alors comment une Australienne de naissance devient la référence de ce qui se fait à Paris ? Je n’ai pas posé la question en ces termes, d’ailleurs l’humilité de Kate l’aurait sans aucun doute donné à se reformuler autrement. Mais la réponse est évidente.


J’ai un parcours pas du tout classique. Je suis australienne, j’étais éditrice dans une maison d'édition indépendante à Melbourne Black Inc., je suis arrivée à Paris fin 2000, je parlais déjà français. Mon premier travail était chez Crashmagazine, un magazine de mode indépendant où j'étais coordonnatrice de la rédaction. C'était une première expérience de la presse que j'ai beaucoup aimée. Après, j'ai commencé à faire un peu de journalisme freelance, j'étais correspondante pour un magazine de mode australienne, Oyster entre autres.

J'ai travaillé chez Time Out Paris. Après ça, j'ai lancé mon propre magazine qui s'appelait GoGo, c'était un fanzine, un guide du Paris culturel en anglais, quand même assez pointu, assez chic. Et puis  ça a basculé sur le web, c’est devenu vraiment plus un guide touristique du monde culturel, pour Paris et Londres, avec des éditions papier chaque saison ainsi que des versions Appli pour Iphone.

En même temps je faisais du consulting ou des créations de contenus pour des marques. J'ai écrit un livre, sorti en 2020, en anglais, qui s'appelle Makers Paris qui était un peu la continuation de ce que j'ai toujours fait avec GoGo. Mais là on a vraiment humanisé pour raconter la personne qui est derrière et qui donne vie à ce projet.



Avec quelle maison d’éditions ?
Avec Prestel, c'est une jolie maison d'édition qui publie des livres assez pointus d'art et de lifestyle.
Je prépare prochainement pour le mois de novembre la sortie de la suite de Makers. Mais avec OFR Éditions ici à Paris. On compte installer ce guide dans le temps avec l'idée de documenter Paris de manière continue et régulière. OFR me correspond vraiment, ils célèbrent vraiment Paris comme moi. OFR est vraiment dans la joie et l'énergie d'une ville libre, ouverte, dynamique et créative.



Comment tu découvres toutes ces adresses ?
Depuis toujours, tout mon travail c'est de savoir qui fait quoi à Paris. Je veille vraiment sur ce qui se passe à Paris dans tous les domaines, donc c'est assez ma deuxième nature. J'essaie au maximum de savoir qui fait quoi, d'aller les voir. 



Tu vas à la rencontre des artisans donc ?
Pas forcément que des artisans. Ce sont aussi bien les artisans que les entrepreneurs. C'est vraiment quelqu'un qui fait vivre une idée, une passion. Mais pas forcément quelque chose de manuel. Dans le première Makers, par exemple, il y avait Veja, ce n’est pas eux qui fabriquent les baskets, mais c'est les entrepreneurs avec une vision, ça c'est intéressant. Des gens qui font vivre un truc génial, qui ont une politique, une éthique. Après il y a aussi des boulangers ou des stylistes, donc c'est très varié. Un maker, c'est quelqu'un qui s'exprime et se réalise par son travail.



Quelles sont les dernières découvertes qui t’ont amusée ou intéressée ?
Ce matin, j'étais aux Puces (de Saint Ouen) parce que dans le prochain livre Makers, il y a une femme qui tient un stand aux Puces, Eva Steinitz, qui est la troisième génération d'une grande famille de marchands d'art qui travaillent depuis longtemps à Paris. Et puis les Puces c’est ma dernière obsession parce que je prépare un livre dessus avec Prestel. C'est tout un monde et je suis juste au début de mes recherches. En faisant les interviews pour le premier livre de Makers, j’étais étonnée par le nombre de personnes à parler spontanément des Puces qui les inspiraient beaucoup, où ils trouvaient des exemples d’anciennes technicités etc..
Il y a quelqu'un d'autre dans le prochain livre que je trouve génial. C’est Arthur Leclerq qui a monté sa marque, Super Stitch, rue Racine à Saint Germain. Et lui, il est geek de denim, mais de l’époque âge d’or donc Levi’s des années 40-50.



(J’adore cette expression « geek du denim », Ai-je besoin de préciser que je me suis empressée d’aller le découvrir ?)
Il est obsédé par des détails que toi et moi on ne verrait pas, comme la façon dont la couture est faite. Il a commencé à racheter des machines d'époque. Il a monté un atelier avec au moins cinq machines différentes. Maintenant il fait des réparations, mais aussi sa ligne de jeans, et depuis peu, des jeans sur mesure.
Aussi une jeune marque, c'est drôle parce qu'ils sont vraiment voisins dans la rue Racine. Elle s'appelle Bourgine, c’est une marque de mode. Un projet très personnel, Caroline s'inspire beaucoup d'histoires françaises, parisiennes, genre des ballets russes pour ces collections. J'aime beaucoup ce qu'elle fait, sa démarche et sa nostalgie. Et son amour aussi pour Paris aussi.



Ces adresses, tu les partages aussi sur ton compte Instagram. Tu as d’autres média ?
J’ai un site aussi mkrs.family puis une newsletter aussi que j'envoie aux 7000 abonnés. Je fais un petit récap des nouveautés que j'aime. J'aimerais le faire toutes les deux semaines mais c'est plutôt tous les mois.



Qu'est-ce qui t’a donné envie d'adhérer à Wise Women?
J'aime déjà l'idée de partage, de connaissances.  J'ai l'impression que c'est beaucoup des gens comme moi, des indépendants qui se sont lancés dans des projets. C’est avoir accès à un cercle bienveillant avec des expertises variées. On a besoin d'être soutenu et de soutenir les autres. Aussi ça me plaît dans l'idée le mentoring. Je n'ai pas encore vu ça en action mais ça m'intéresse. Je sais que moi-même, jeune femme, je ne venais pas d’un milieu spécialement favorisé et certaines rencontres ont vachement changé ma vie.



Des rencontres avec des femmes ?
Oui notamment une femme qui a été mon mentor, la mère d'une copine qui m'a bien aimée et qui m’a aidé à trouver un peu ma voix, qui m'a donné des opportunités qui ont vraiment fait basculer le cours de ma vie. J'aime beaucoup aussi rencontrer des jeunes gens et l’énergie de la jeunesse.



C’est ce qui t’intéresse dans l’appel à projets ?
Découvrir des jeunes, être dans la transmission. Je pense que j'ai des choses aussi à apporter et je suis curieuse de voir quel genre de projets il y aura. On m’a dit que les projets gagnants de l'année dernière étaient vraiment de bonne qualité. Je suis hyper contente de participer. D'après ce que je ressens à Paris, il y a tellement d'énergie, de projets. En plus, on est encore un peu dans cette période post-covid où il y a beaucoup de projets personnels qui ont pu naître, on est toujours en train de les voir éclore.



Et toi, est- ce que tu attends quelque chose de Wise Women par rapport à tes projets ?
C’est la notion de réseaux, un réseau privilégié pour échanger, partager des choses. J'imagine que ça pourrait être un terrain fertile pour moi dans mes projets.



Le côté féminin du réseau, c’est un élément important pour toi ?
Je suis quelqu'un qui aime la mixité et je me sens beaucoup de solidarité avec les hommes. En Australie, j’ai fait mes études au collège et lycée dans des école féminines, et j'ai bien aimé ça, mais je trouve que ça déforme la vie un peu. Être entre femmes, ce n'est pas quelque chose que je recherchais forcément, mais pour l’instant l’expérience me plaît beaucoup.



Quelles sont les trois femmes que tu aimerais ou aurais aimé rencontrer ?
Lee Miller, Patti Smith, Rachel Cusk.









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